Comme d’autres sélections, la Suisse peut se plaindre d’une saison tirant en longueur. Le manque d’implication de ses joueurs a pourtant de quoi agacer. Après tout, c’est leur boulot.
Une saison trop longue, un calendrier mal ficelé voire démentiel, des acteurs éreintés, une Ligue des nations qui n’intéresserait personne (hormis pour ce qui concerne son intérêt financier), etc. Voilà ce que l’on entend depuis une semaine un peu partout, pas seulement dans notre pays. Un refrain connu, repris en chœur par plus d’un sélectionneur, dénonçant un exercice 2021-2022 qui n’en finit pas de s’étirer. Même Didier Deschamps s’y est mis, évoquant l’absurdité d’un calendrier obligeant ses joueurs à effectuer des heures supplémentaires. Ouh là là…
Autant de pleurnicheries qui tombent mal venant de millionnaires en goguettes. Autant d’excuses bidons qui n’ont pas leur raison d’être à nos yeux. Cela correspond davantage à un manque de respect vis-à-vis de supporters qui, eux, ne rechignent jamais à (se) dépenser sans compter pour encourager leurs favoris respectifs, qu’à la réalité de formations peu soucieuses de «livrer la marchandise» comme on serait en droit de l’espérer.
La vie de palace est fatigante
Remarquez, ces histoires de saison interminable sont surtout le cas des perdants, tant il est vrai que l’on récupère différemment de ses efforts (?) suite à un succès qu’après un fiasco. À cet égard, on peut comprendre que la Suisse de Murat Yakin soit très fatiguée – mais de quoi au fait? De ce qu’elle n’a pas montré à Lisbonne? De ces conditions de voyages astreignants, effectués de nuit comme chacun sait, à bord de compagnie(s) aérienne(s) à bas prix afin de réduire les coûts? De ces hôtels de troisième catégorie choisis dans un quartier bruyant, souvent près d’une gare, pour faire baisser la facture? La vérité, c’est que la vie de palace sur terre et la classe business dans les airs semblent peu convenir à nos as du crampon.
Certes, enchaîner quatre matches de prestige en onze jours n’est peut-être pas l’idéal pour les internationaux helvétiques, mais n’est-ce pas là après tout leur boulot? Plutôt que de nous bassiner avec leurs corps meurtris et leur fatigue psychique, ce boulot, qu’ils le fassent après tout! Pourtant plus souvent engagées tout au long de la saison, les stars de la Seleção se sont curieusement beaucoup moins plaintes, allez savoir pourquoi. Bref, passons.
Si un footballeur suisse n’est pas capable d’aligner quatre rencontres au mois de juin, c’est peut-être alors qu’il est mal préparé. D’une façon globale, pourquoi la saison des joueurs serait-elle plus fatigante que celle des fans qui les soutiennent à longueur d’année? Vous, moi, chacun d’entre nous aspirons tous aussi à des vacances sans pour autant nous lamenter de ne pas pouvoir y goûter maintenant. Au moment de prôner l’union sacrée et l’unité nationale avant de défier l’Espagne puis le Portugal à Genève, peut-être nos chers footballeurs devraient-ils moins penser à eux-mêmes qu’à leur public.
Pesanteur à évacuer
Devant la grogne populaire qu’ont suscitée les dernières sorties à blanc de la Nati, il convient aussi de remettre pareille pesanteur dans le contexte de ce début d’été particulier. En temps normal, les Suisses prépareraient actuellement une Coupe du monde et galoperaient tous comme des lapins pour figurer dans la liste des 23 joueurs retenus. Cela avait été le cas voici quatre ans quand les protégés de Vladimir Petkovic s’étaient réunis au Tessin pour y fignoler le Mondial 2018 en Russie et une première échéance fixée le 17 juin contre le Brésil.
La Coupe du monde au Qatar repoussée avant Noël, on peut dès lors s’étonner de voir ceux de Murat Yakin traîner la jambe et ne pas aborder cette autre compétition avec le sérieux qui s’imposerait. À moins que cette Ligue des nations ne soit rien d’autre qu’une vaste plaisanterie dont tout le monde se moque éperdument, excepté ceux et celles qui ont payé cher pour venir soutenir les plaisanciers helvétiques.
Cette Suisse si flapie nous a suffisamment fatigués jusque-là pour ne pas la voir dès jeudi s’époumoner à se faire pardonner son manque de niaque. Pour les joueurs et son sélectionneur, l’heure du réveil a sonné.
Qu’importe la supposée fatigue accumulée des uns et des autres.