C’est en faisant preuve de réalisme et de solidité à tous les postes que l’équipe nationale a enfin trouvé la voie du succès en 2022. Cette victoire 1-0 porte le sceau de Yakin, Omlin, Akanji et Xhaka.
- par
- Valentin Schnorhk
(Genève)
Pour tout dire, il y a une forme de surprise. Que la Suisse gagne contre le Portugal est un événement en soi. Mais le genre de choses qu’on se permettait d’imaginer il n’y a pas si longtemps. Jusqu’à dernièrement même, et ce mois de juin franchement pas convaincant.
Que s’est-il passé dimanche pour que tout change, pour que l’on retrouve une équipe nationale sûre d’elle et capable de maîtriser un peu mieux les matches? Prise de conscience collective? Changement de cap? Sans doute un peu de tout ça. Mais voilà la Suisse autrement plus sereine. Dans cette Ligue des nations, où elle peut toujours espérer se maintenir en Ligue A, et dans sa préparation à la Coupe du monde.
Les trois enseignements
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Quelque chose s’est passé à la mi-temps de Suisse-Espagne jeudi. C’est indéniable. Comme si la Suisse avait lâché la bride et accepté d’être elle-même. Ce succès-là est en grande partie celui de Murat Yakin et de son plan de match plus courageux que lors des précédentes rencontres. L’équipe nationale se sent bien quand elle presse, alors elle l’a fait d’entrée dimanche. Cela lui a permis de trouver la faille. Une fois, cela suffisait. Et puis, il fallait tenir bon. L’approche plus attentiste, mais pas passive qui a permis de maintenir ce résultat vient aussi du sélectionneur.
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Mais difficile de ne pas associer à cette performance et ce résultat les matches de Manuel Akanji et Granit Xhaka. Sur le terrain, la Suisse n’a pas un leader. Elle en a deux: Akanji et Xhaka sont ceux qui déterminent les temps de match de l’équipe nationale. Parfois, il faut presser haut, parfois il faut attendre. Ils font en sorte que ce soit en bloc que la formation de Yakin agisse. Alors que sans eux, elle s’éparpille, se disperse et n’est plus dans la gestion. Pour voir grand, la Suisse a besoin de ces cadres-là.
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Une hiérarchie se dégage au poste de gardien de but en vue du Qatar. Derrière Yann Sommer, Jonas Omlin gagne le droit d’être le numéro 2, surtout avec le match qu’il a réalisé. Bien que Yakin ait préféré ne pas se prononcer («Nous analyserons avec Patrick Foletti»). Et même s’il est passé à côté de son match à Lisbonne (la défaite 4-0), Gregor Kobel a toute légitimité à être le numéro 3. Yvon Mvogo a lui accompagné le groupe pendant ces vingt jours, mais il semble devancé, malgré ses bonnes prestations récentes en club.
Le meilleur Suisse: Jonas Omlin
C’est bien sûr l’histoire d’un match. Mais c’est la preuve que le portier de Montpellier a toute sa place comme doublure. Au total, Omlin aura effectué huit arrêts. C’est beaucoup. Peut-être trop, bien qu’acceptable face à une attaque comme le Portugal. Son jeu au pied inspire en revanche certains doutes: il n’est pas toujours dans le rythme de l’action, ce qui l’a conduit à devoir effectuer un crochet sur un attaquant portugais qui le pressait en première période. Mais la Suisse est sans doute trop bien habituée avec Sommer dans ce domaine. Il n’empêche, les défenseurs peuvent jouer avec lui, et c’est un élément trop important pour être négligé.
Le moins bon Suisse: Breel Embolo
Il faut peut-être l’expliquer par le poste qu’il a occupé (sur les ailes, en alternance avec Okafor), mais Breel Embolo est passé à côté de son match dimanche. Au total, il n’aura touché que 22 ballons sur les 66 minutes qu’il a jouées. C’est très peu (Okafor en a touché 39 pour un temps de jeu similaire), et cela explique sans doute des décrochages intempestifs, très bas, conduisant à certaines erreurs techniques qui auraient pu coûter cher à la Suisse. Sans doute la preuve que l’attaquant de Gladbach est un joueur d’axe et qu’il éprouve beaucoup de peine à faire avancer le jeu lorsqu’il est placé sur le côté.
La décla’
«Nous avons vu durant ce stage que certains joueurs étaient mieux une fois arrivés au 4e match. Mais à la Coupe du monde, nous n’aurons pas ce temps de préparation. Il faudra que les joueurs soient prêts»
Le fait tactique
Forcément cette première minute de jeu. Un bloc intentionnellement très haut. Avec un pressing éprouvé depuis plusieurs matches et qui a enfin porté ses fruits: l’ailier droit (en l’occurrence Shaqiri) qui presse le défenseur central gauche portugais, puis le latéral droit (Widmer) qui sort sur le latéral gauche adverse, à 90 mètres de ses propres buts.
Le bloc est particulièrement haut, au point qu’Akanji n’hésite pas à suivre un décrochage portugais quinze mètres dans le camp adverse. La récupération du but suisse vient de là, jusqu’au centre de Widmer pour Seferovic. Et cette attitude s’inscrivait dans la lignée de celle démontrée contre l’Espagne en deuxième période. Une formule qui fait ses preuves.
La statistique
15, comme le nombre de dégagements effectués par la paire Akanji-Elvedi dans leur surface. Il y en a 7 pour le premier, 8 pour le second. Dont 10 dans les dix dernières minutes. Cela compte aussi pour conserver un score, face aux assauts portugais. Est considéré comme dégagement une intervention défensive qui permet de soulager la pression. Jonas Omlin n’a donc pas été livré à lui-même.
Une question pour l’avenir
Yann Sommer excepté, Murat Yakin a-t-il trouvé son équipe-type dimanche?
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